Jan VERHOEVEN
(1870–1941)
Jan Levinus Gerardus VERHOEVEN est né à Amsterdam, dans une famille où la spiritualité avait grande place. Des études littéraires solides lui permirent l’acquisition d’une belle maîtrise de la langue française.
Jusqu’en 1900, il se fait voyageur dans les Indes Orientales Néerlandaises (Indonésie), mais aussi en divers comptoirs régis par les Pays-Bas. Et ce périple comptera amplement dans son œuvre picturale.
Nature morte au pichet bleu.
Jan est un zélateur du charismatique médecin psychiatre et écrivain hollandais Frederik van Eeden (1860 – 1932). Celui-ci, avançant des idées à mi-chemin entre celles de Charles Fourier et de Jean Marin Charcot, avait l’ambition de réformer la société dans le sens d’un monde heureux. En avançant des truismes comme « L’amour sans sagesse est aussi dangereux que la sagesse sans amour », il recueille un bel écho en Hollande. Il prône par ailleurs l’art pour l’art ; et cette vision autotélique marquera le très catholique Jan Verhoeven.
Alentour de 1900, Jan s’en vient en France en tant que correspondant de journaux hollandais. Il donnera même des feuilles dans la revue La Plume de Jean Royère. Il s’installe définitivement à Paris, à deux pas de son compatriote et ami, le peintre Kees van Dongen ; lui vient bientôt la vocation de peindre lui-aussi, et il reçoit conseils des tout meilleurs peintres de Montmartre.
Quand sa fille, Pierrette, lui naît en 1904, il est déjà reconnu dans le cénacle des grands peintres modernes. Dès 1906, il expose au Salon d’Automne et au Salon des Indépendants. En 1909, il est invité par la Berliner Secession, tandis qu’il montre deux peintures au Cercle de l’Art Moderne havrais.
Il expose aussi à Paris chez Berthe Weill et Druet ; Amsterdam et Zürich l’honorent également. Et à partir de 1927, il est un exposant régulier du Salon des tuileries. Le succès lui permettant une certaine aisance, il acquiert une petite maison à Bresse-sur-Grosne (Saône-et-Loire) et emmène de temps à autre sa famille à Bandol dans le Var.
Ce peintre, qui pourrait ne paraître que naïf, mérite mieux qu’un regard car il s’agit d’un des coloristes les plus sensibles, les plus doués, les plus insolites de sa génération. La subtilité de ses natures mortes est troublante ; elles donnent un sentiment de jamais vu. Ses paysages sont de même, comme s’il tenait à dire quelque chose d’une harmonie secrète dans l’ordre de la nature.
Ses visages, invariablement mystiques, yeux ouverts ou yeux fermés, disent des rêves en cours. La tension psychique est toujours présente qui montre un réel chahuté par l’irruption de l’invisible en son sein. Avec ses danseuses exotiques (de Java, de Ceylan, d’Inde ou d’Afrique), c’est toujours une intériorité qu’il signifie dans cet art qui allie le corps et l’esprit. Jan Verhoeven a offert, sa vie durant, des symphonies colorées qui sont sans conteste une des faces du fauvisme.
Sa fin est tragique. Lui qui confiait la nécessité de considérer la vie comme une bénédiction et un privilège, est considéré à partir de 1937 comme un artiste dégénéré par les nazis. Dans des circonstances mal connues, certaines de ses œuvres sont détruites, même s’il semble acquis que quelques-unes gagnent la Suisse. Il est arrêté, et déporté vers d’un camp de concentration ; mais, affaibli, il mourra pendant le voyage, le 17 mai 1941.
Femme aux yeux fermés.